l’Esprit du lieu

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Grand-Lieu, lieu intouchable, lieu sacré ?

publié le mercredi 5 octobre 2016

Par Arnaud de la Cotte.

Revenons sur le passé de Grand-Lieu qui est marqué par son histoire religieuse. Elle commence dès les premiers siècles de notre ère. Les habitants du site ont été portés par des croyances animistes dont il ne reste que des légendes : la ville engloutie d’Herbauges… Des histoires qui enveloppent le site dans un voile de mystère. Ici, se mêlent les phénomènes naturels et l’imaginaire.
L’abbé G. Brunelière dans son ouvrage « Histoire de Saint-Philbert-de-Grand-Lieu » évoque l’ancien nom de la commune Déas. Certains érudits ont voulu voir dans l’origine de ce nom « le souvenir d’une antique divinité païenne, le nom grec de Cybèle, la déesse de la terre et de ses fruits… » (Nous ne pouvons pas développer ce sujet dans ce travail.)
Ainsi, le lieu est chargé de significations modernes et anciennes qui se sont sédimentées couche par couche. Jean-Luc Parant travaille sur le terrain ; il utilise l’argile et la tourbe, fouille le sol, la vase, la boue. Il fait remonter à la surface du présent des morceaux de passé pour créer du présent. Il crée son œuvre à partir des 4 éléments, la terre, l’air, l’eau, le feu chers à Bachelard.


Les lectures de Jean-Luc Parant sont des sortes d’incantations. Sa particularité est due à sa circularité : « car, sur la circonférence, le commencement et la fin sont communs », comme le dit déjà Héraclite. Parant, qui se situe exactement sur ce périmètre, est le premier et le dernier des hommes, il peut donc parler comme le plus ancien de tous et converser avec ses pairs, Merz, Beuys ou Nauman, comme avec l’artiste de Lascaux… » Parant crée un territoire, une géographie circulaire, sacrée.
Quoi qu’il en soit, le travail de Parant a quelque chose à voir avec le sacré, avec l’idée de Dieu. Nous trouvons un indice pour confirmer cette hypothèse dans son premier texte publié, intitulé : « les yeux de Dieu » .
Le travail de Jean-Luc Parant nous montre que l’art peut proposer une autre voix (entre interdit et appropriation du lieu). La découverte du lieu et la rencontre avec les habitants sont possibles. Donc la mise en œuvre d’un projet de valorisation culturel à dimension touristique est possible.
L’art est une manière de connaître et de s’approprier l’invisible, l’inconnu. De donner une image, une représentation à ce que l’on ne peut pas voir. Associé à la protection des sites, il peut produire un puissant mode de développement. Il y a des lieux où l’homme peut décider de ne pas aller sans pour cela les abandonner. Décider de ne pas utiliser un lieu, c’est un choix et c’est déjà une façon de le faire entrer dans « le domaine culturel ».

L’artiste en résidence donne du sens au lieu, il rejoint l’idée du sacré.
« Ainsi, il est évident que la géographie des phénomènes religieux, et plus généralement la géographie du sacré et du symbolique, est en plein essor. Ce renouveau n’est pas qu’un effet de mode, il s’inscrit plutôt dans le vaste bouleversement du monde contemporain. On peut, entre autres, évoquer l’importance croissante de la religion pour l’homme par le prisme du regain de religiosité et pour l’humanité par celui de la compréhension de la géopolitique planétaire. » Ce texte consacré à la préparation d’un colloque intitulé « Sacrée nature, paysages du sacré ! » vient conforter notre réflexion.
Selon Mircea Eliade « On n’insistera jamais assez sur le paradoxe que constitue toute hiérophanie, même la plus élémentaire. En manifestant le sacré, un objet quelconque devient autre chose, sans cesser d’être lui-même, car il continue de participer à son milieu cosmique environnant. Une pierre sacrée reste une pierre ; apparemment (plus exactement : d’un point de vue profane) rien ne la distingue de toutes les autres pierres. Pour ceux auxquels une pierre se révèle sacrée, sa réalité immédiate se transmue au contraire en réalité surnaturelle. » L’art de Parant à Grand-Lieu, est une parfaitement illustration de ce propos.